20 novembre 2007

In de Wulf.... In...oubliable.

Dîner du 17 novembre 2007

Après maintenant 8 visites en 2007 – mon activité professionnelle me permettant d’être dans les parages, autant en profiter … :o) – il est grand temps de consacrer un nouveau compte-rendu à l’autre pépite du paysage gastronomique belge : In de Wulf.

Lecteurs de ce blog, vous connaissez mon admiration (et celle de GoT) pour le talent de San de L’Air du Temps. Elargissons un peu le cercle et ouvrons-le à Kobe Desramaults, jeune et talentueux chef d’In de Wulf.


8 visites depuis le début de l’année disais-je, et autant de très bons repas, dont un avec GoT le 11 mai dernier, nous avions déjà posté un CR vantant les mérites de cette adresse nichée en pleine campagne flamande, à quelques encablures de Nieppe, Armentières, Lille, la France. Ce repas avec GoT en mai dernier avait déjà procuré quelques excellents moments gastronomiques, tout en laissant cependant échapper quelques petites déceptions sur l’un ou l’autre plat.

Scène matinale de campagne dans le Heuvelland

Samedi dernier, mon ami Fred (autre GoT member belge), moi-même et nos chéries respectives avons simplement été les témoins d’un extra-ordinaire dîner, dans tous les sens du terme. Un dîner qui témoigne du chemin parcouru en quelques mois par cette jeune équipe : avancer et évoluer avec son temps, afficher et revendiquer sa propre identité, développer une cuisine technique, contemporaine, une vraie cuisine d’auteur, puissante, vive, directe. Une cuisine extrêmement généreuse, attachante, déroutante, parfois provocante, souvent touchante. Une cuisine jouant sur le produit, si possible du terroir, travaillant les textures et offrant des goûts puissants et tranchés. Une cuisine moderne, osée, jamais futile, toujours assumée.

L’établissement a lui aussi, depuis notre première visite, subi un fameux lifting : le restaurant a été agrandi, le cadre était déjà superbe avant, il s’est encore considérablement embelli. De nouvelles chambres joliment décorées ont vu le jour, l’espace général a été réaménagé, la décoration ajustée et d’avantage en accord avec l’atmosphère contemporaine de l’ensemble, une nouvelle cuisine a été conçue, spacieuse, aux lumières douces, proposant une table d’hôte lovée au fond permettant de contempler le ballet des cuisiniers en action, un large coin salon a été aménagé, confortable et calme, proche des cuisines et de l’accueil, on y sert l’apéritif et les cafés/mignardises… la salle de restaurant (45 couverts maximum y sont servis) compte quelques tables de plus, toujours dans les tons gris, beige, blanc, … éclairée par quelques lumières tamisées et beaucoup de bougies dispersées …l’ensemble est très réussi, atmosphère vraiment détendue, intime, de bon goût.


Mais place au menu, surprise, concocté spécifiquement pour nous par Kobe, je lui avais demandé d’inclure quelques plats « best-of » dégustés pendant l’année, il l’a fait :

« 4 x Porc »


Palourdes en escabèche


Crème de navet, châtaignes, croquette de canard


Huîtres et algues


Royale de crabe de mer du Nord, oursin et œuf mousseux


Fenouil, herbes et caviar de truite


Foie d’or


« Rollmops » de bar de mer, moules de Zélande et chlorophylle


Mousse d’œuf de cabillaud fumé, coquille St-Jacques de Dieppe marinée et escabèche de girolles


Ratte du Touquet écrasée, œuf de caille, crevettes de Zeebrugge


Langoustine poêlée, javanais de foie de canard et potiron, crunch de pépites, vinaigrette de crustacés


Turbot cuit à basse T°, huître « perle blanche », gel de bière « St-Bernardus triple » et lard, crème de topinambours


L’huître et ses perles


Anguille laquée, céleri rave, cresson du jardin, bouillon d’anguille, volaille et d’ail fumé


Risotto de bulots et encornets


Queue de bœuf braisée, trompettes de la mort, chicorée et salsifis


Filet de chevreuil, betterave rouge, purée de Millet


Au terme de ce plat, nous sommes invités à rejoindre la cuisine pour prendre place à la table d'hôte dressée à notre attention... quel plaisir de pénétrer dans un lieu souvent inacessible, où nous pouvons contempler le chef et son équipe à l'oeuvre....


Les fromages, pain aux noix, salade, compotes


Textures de noisettes


« Nougat »


Chocolat « Maracaibo »


Riz au lait


« Matcha, pistache et menthe »


Mignardises

on finit sur une note 100% belge... des croustillons... ou "smoutebollen" en flamand...

Cela peut paraître évidemment gargantuesque, un peu comme notre dernier repas festif à l’Air du Temps. Pas du tout, comme chez San, les portions sont bien dosées, équilibrées, le menu se déroule en cohérence, à un rythme soutenu mais cependant correct. Sur chacun des plats servis, le visuel est travaillé, les goûts sont incroyables, puissants, les textures s’entrechoquent, les températures aussi, du givré, du moelleux, du tiède, du croquant… un vrai ballet de saveurs et sensations ne laissant aucun répit à nos papilles.

Difficile de sortir un plat du lot, les 7 premières tapas donnent le ton, les premières entrées vous font entrer de plein pied dans le monde de Kobe, terre/mer, terroir revisité. Puis avec la langoustine et jusqu’au chevreuil, on entre dans du très haut niveau (javanais foie/potiron, perles d’huîtres, risotto de bulots,…), des cuissons parfaites, du grand et beau produit.

Enfin, les 5 desserts ne sont rien d’autre qu’un feu d’artifice de goûts et de textures, il joue avec l’azote liquide et finit avec une fabuleuse association thé matcha, pistaches et menthe pour clôturer les festivités.

Clôturer ? non ! quelques irréductibles et nombreuses mignardises débarquent alors, sensationnelles elles aussi, de quoi vous achever complètement.

Côté vins, le menu étant « surprise », difficile de sélectionner les flacons qui vont bien, nous faisons donc une fois de plus confiance à la sélection des vins proposée et voici ce qui nous sera servi (un vin pour 3 ou 4 plats) :

- Jurançon Sec, Domaine du Cinquau, 2005
- Santa Chiara, Vernacccia di San Gimignano, 2006, Italie
- Bourgogne blanc, Jean de la Vigne, Maison Cordier, 2006
- Les Aphillanthes, Cuvée des Galets, Cote du Rhône, 2001
- Champagne J. Selosse, « Initiale »


Ces vins seront dans l’ensemble de bonne facture, s’accordant plutôt bien avec le menu, avec une mention spéciale pour le blanc italien et évidemment le Selosse que nous avions spécifiquement demandé en fin de repas. Difficile cependant de mettre les vins en avant par rapport au dîner tant les plats servis sont sur le devant de la scène, le vin venant en support, en accompagnateur discret, modeste, presque volontairement en retrait.

Vous l’avez constaté (grâce aux magnifiques photos prises avec le Nikon de Fred), chaque plat, chaque met servi est une concentration de goûts autour d’un produit. Chez Kobe, il y a un peu de Noma dans les textures, dans le minimalisme de certains plats, aériens, exclusivement centrés sur le goût et le produit, il y a un côté floral, champêtre, terroir…, mais il y a aussi du Gagnaire dans cette cuisine : technique, complexe, concentrée dans l’assiette qui met en scène plusieurs éléments, pas toujours complémentaires à priori, pour proposer un tableau final cohérent, harmonieux.

Un merveilleux dîner ponctué d’un long et bel échange avec Kobe, qui eut la gentillesse de partager un peu de son temps avec nous jusqu’à tard dans la nuit. Nous le remercions encore, lui et toute l’équipe pour cette très belle soirée… une de plus me direz-vous… ce n’est pas faux, on a une très belle année.

Laurent V

14 novembre 2007

3 ouvrages à découvrir...

3 ouvrages parus récemment, 3 livres de cuisine de très grande qualité, que GoT souhaite vous faire partager et découvrir :

- Cooking Casting, de Sang Hoon Degeimbre et Jean-Pierre Gabriel


... 3kg et 2 tomes de talent et de passion à partager.

Tome 1 : des recettes (une centaine) clairement documentées et magnifiquement photographiées, permettant de suivre dans le temps la cuisine de San, son évolution...

Tome 2 : les fournisseurs, les artisans, les êtres humains qui participent de près ou de loin à cette aventure qu'est L'Air du Temps.

Pour plus d'infos ou vous le procurer, cliquer ici.

- Evolution, de Denis Martin


Chef suisse, relativement avant-gardiste, que nous ne connaissions pas. Quelques pages lues dans les rayons d'une librairie ... et quelques secondes plus tard : il était acheté. Des recettes et technologies modernes et contemporaines, superbement mises en scène, et facilement réalisables (GoT en est la preuve vivante... :o).

Parfait pour les amateurs de cuisine contemporaire qui veulent un peu surprendre leurs convives lors d'un prochain repas à domicile...

- Côté Crillon, Côté Maison, de JF Piège, P. Mikanowski, G. Symon


Le chef renommé et double étoilé des Ambassadeurs (de l'hôtel du Crillon) livre ici une oeuvre épatante, complète et drôlement bien conçue, proposant tant des recettes "haut de gamme" ayant fait sa réputation que des recettes plus accessibles, à faire chez soi ... et sans se faire mal.

Bonne lecture !

GoT

10 novembre 2007

La Gazzetta (II)

Dîner du mardi 6 novembre 2007

Nouvelle visite, la 2éme cette année (lire ici pour le 1er CR), à La Gazzetta de Peter Nilsson.

Mais cette fois avec l'appareil photo, héhé.


Alors verdict après 1 an de présence de ce jeune chef en cuisine et 2 visites :

- le restaurant affiche toujours complet...
- le service est toujours aussi sympa, disponible et efficace,
- la carte des vins révèle de véritables petits trésors cachés (et fort bien conseillés par l'équipe en salle),
- les menus respirent toujours autant la créativité et qualité pour des prix que l'on ne trouve que trop rarement de nos jours sur Paris,
- le chef - bien présent - est toujours aussi peu visible salle, voir limite inaccessible : timidité ou volonté de garder ses distances ?

Bref, une adresse toujours aussi plaisante, même mystérieuse je trouve (et ce n'est pas péjoratif), qui fit l'unanimité des convives ayant participé à ce repas mardi dernier.

Quelques photos sur le cadre et l'ambiance..


Après un apéritif où la plupart de la tablée choisit un intéressant blanc La Clape, Brise Marine, Chateau de Negly 2005, place au menu à 45€ proposé ce soir là par le chef et se déclinant comme suit :

- Salade tiède d'Automne, "Praliné" noix-noisettes
Vin : Fleur de Cailloux 2006, VDP des Côtes Catalanes


Superbe entrée, on entre de plein fouet dans des saveurs d'automnes, aux textures croquantes, fondantes... Véritable découverte aussi que ce vin de pays très original en bouche et apportant une belle fraîcheur complémentaire au plat.

- Couteaux et beurre noisette, Eau et écrasé de pdt ratte, mouron des oiseaux
Vin : Fleur de Cailloux 2006, VDP des Côtes Catalanes


Plat à la présentation simple mais parfaitement réalisé : on apprécie la cuisson des couteaux, supporté par une purée de ratte bien faite et complété par cette herbe fraîche.

Le vin fait toujours bonne figure...

- Aile de raie grillée, purée de potimarron, pommes en l'air - aneth
Vin : Venico Ronco del Cera, Collio, Sauvignon, 2004


Très bonne cuisson de la raie, superbe purée de potimarron, l'ensemble rafraîchi par ces petits dés de pomme à l'aneth...un très beau et bon plat..

Le vin, plus gras que le précédent, s'accorde bien avec ce plat même s'il présente moins d'originalité que le blanc précédent.

- Joue de boeuf confite et trèfles, Salsifis - abricots - genièvre
Vin : Clot de l'Oum, 2003, Roussillon


Viande fondante, goûteuse, salsifis poêlés (finalement c'est bon les salsifis... ), plat agréable dans l'ensemble mais que je positionnerai légèrement en retrait par rapport aux autres réalisations.

- Abbaye de Citeaux, crème de panais, Poire -poivre
Vin : Domaine Ollier Taillefer, Castel Fossibus, Faugères, 2002


Photo qui ne révèle rien : si ce n'est que tout se passe à l'intérieur..

LE plat de la soirée : celui qui fait parler, celui pour lequel il n'y a pas unanimité... sur notre table de 9, nous devons être 3, voir 4 maximum à apprécier cette association osée, puissante, provocante entre un fromage fondu et au goût (très) prononcé avec l'onctuosité d'une crème de panais, relevée de poivre et lamelles de poire séchée et croustillantes... tout cela tiède, servi dans un petit ramequin où il faut plonger à l'aveugle et ramener en bouche cette explosion de saveurs...

Personnellement j'ai adoré, probablement l'une des associations les plus surprenantes de l'année...

Petit mot aussi sur le Faugères, qui affiche une belle rondeur, une belle longueur en bouche... le vin de la soirée.

- Ile flottante, Manjari - pruneaux -citron
Vin : Domaine Ollier Taillefer, Castel Fossibus, Faugères, 2002


Peter Nilsson aime revisiter des classiques, et il le fait très bien.

Nouvelle démonstration ici avec cette île flottante... Dessert très intéressant dans ses textures et ses goûts à nouveau bien tranchés. Une belle fin de repas.

Bon, l'association avec le vin n'était pas au top, mais il fallait finir la bouteille... :o)

Voilà donc une nouvelle visite concluante d'une adresse simple et décontractée, présentant une cuisine créative, parfois provocante, une cuisine directe traduisant sans artifices la personnalité du chef.


Pour finir, je confirme : à refaire, sans modération.

GoTiquement vôtre,

Laurent V